Bach - Suites

JOHANN SEBASTIAN BACH 6 Suites pour violoncelle seul
Valérie Aimard, violoncelle

2 CDs - Label ENPHASES (ENP014)
Sortie le 6/10/2023 Distribution OUTHERE 

Enregistrement : 
Eglise Notre-Dame d’Halsou - France (64)
26 - 28 Mai 2022 (Suites 3 - 4) 
4 - 8 Juillet 2022 (Suites 1 - 2 - 5 - 6) 

Prise de son / Direction Artistique / Montage  :
Franck Jaffrès / Unik Access  
Textes : Valérie Aimard 
Traduction : Betsy Schlesinger 
Photos : © Steve Murez 

Elles conserveront éternellement une aura unique auprès des musiciens et du public. 
Elles sont indispensables à l’existence de tout violoncelliste. 
Elles ont été composées à la même époque que les Concertos Brandebourgeois. 
Vous le saviez déjà. Mais que dire qui n’ait déjà été dit ? 
Les Suites sont à la fois un monde très absolu et complètement LIBRE.  
Rien qui ne soit essentiel, pas de creux, pas d’ajouts, chaque note est indispensable. 
Bach a une ouverture permanente de la pensée : ce sont des suites d’ouvertures successives.
Il OUVRE TOUJOURS, il ne ferme jamais. 
Aucun autre compositeur ne peut écrire une telle polyphonie avec une seule ligne. 
Avec une chose, il fait une immensité.  
Chaque moment, joué dans sa singularité, rayonne sur le tout. 
Avec une sorte d’écho de ce qui précède, Bach crée un espace complet, vertigineux, UNIQUE.
Il faut livrer à la fois l’INSTANT et l’UNIVERS qui le contient. Être dans l’œuvre. Tout est dans la musique et, en même temps, toute la place est laissée à l’interprète. 
C’est une musique au delà de l’humain. Bach devait exister avant la Création de l’Homme.

Valérie Aimard

J’ai grandi avec les enregistrements des Suites de Pierre Fournier, Paul Tortelier et Pablo Casals. En vérité, je n’ai jamais beaucoup écouté les Suites pour violoncelle, mais plutôt les Brandebourgeois, les Suites pour orchestre, les Concertos pour violon, pour piano, les Suites anglaises, françaises, le Clavier bien tempéré, bien sûr. J’étais plus attirée chez Bach par sa musique ‘ de tous les jours ’ que par les Cantates ou les Passions. 
A l’époque où je passais des concours, très souvent on me disait : ‘ J’ai beaucoup aimé votre Bach ’. Je ne comprenais pas trop pourquoi, je n’avais joué que ce qui était écrit dans la partition. C’était ma botte secrète. 
A la fin de mes études, j’aurais pu (peut-être dû ?) me laisser happer par la vague du Baroque qui commençait tout juste. Mais, à ce moment-là, j’ai rencontré Bernard Greenhouse, le légendaire violoncelliste du Beaux-Arts Trio, disciple de Pablo Casals. Sa sincérité, son sens du phrasé, l’utilisation du temps dans l’interprétation, la simplicité de sa technique et la chaleur de sa sonorité m’ont toujours bouleversée. Sa rencontre a changé ma vie musicale. 
La première chose qu’il m’ait dite ? ‘ Express yourself. ’ Ce fut un choc, on ne me l’avait jamais dit. 
Il enseignait un Bach très romantique où l’on avait le droit de vibrer, d’avoir des idées et d’être créatif. J’ai suivi et exploré cette direction avec délectation. De temps en temps, je jouais quelques Suites par-ci par-là, et puis je les ai mises de côté pendant très longtemps. Musique de chambre, mime, enseignement, théâtre musical, musique contemporaine, rencontres passionnantes ont nourri ces riches années artistiques. 
Jusqu’à l’année 2017, où lors d’un important tournant de ma vie personnelle, j’ai eu besoin de m’y plonger et de les rejouer telles qu’elles étaient gravées en moi. Je me suis alors lancée, après un profond travail, dans mes premières Intégrales en concert. En deux concerts, en un concert, dans un ordre mûrement réfléchi, dans l’ordre chronologique : j’ai pu éprouver ainsi toute la force de la construction dans son ensemble. C’est dans leur succession que les Suites prennent toute leur dimension. 
Une fois cette série d’Intégrales terminée, je me suis dit ‘ Et maintenant ?

C’est là qu’est née cette idée un peu folle d’enregistrer en video une collection d’œuvres retraçant l’Histoire du violoncelle seul.  ONLY CELLO est une chaîne You Tube que j’ai créée pour faire connaître au plus grand nombre ces œuvres extraordinaires : tout à la fois autobiographie musicale et Anthologie du violoncelle seul.65 pièces, 22 compositeurs, près de 6 heures de musique : des premiers Ricercare composés en 1680 aux Haikus de Guy Reibel écrits spécialement à mon attention en 2020, en passant par le fabuleux répertoire du 20ème siècle : Lutoslawski, Dutilleux, Ligeti, Britten entre autres et le si précieux György Kurtag.Une fois ce travail colossal achevé, il m’est apparu comme une évidence : « Et maintenant ?…. les Suites ! » Il ne manquait plus qu’elles à cette Anthologie.

Comment graver une musique aussi vivante ?  
Décider pour de bon d’une interprétation ? Fixer pour toujours un tempo ‘ idéal ’ ? 
Tant d’années sont nécessaires à l’élaboration d’une interprétation. Tant de possibilités s’offrent à nous. 
Être l’interprète d’un disque, c’est aussi : écouter pendant des heures les prises enregistrées, choisir celles qui s’harmoniseront le mieux, en abandonner certaines à regret, se laisser séduire par d’autres ( ‘ je ne l’ai jamais joué comme ça ! ’ ), avoir la patience, la ténacité de toujours chercher mieux, de ne pas désespér-er parfois. Peaufiner les plus infimes détails par la subtilité des montages, maitrisés ici à la perfection par Franck Jaffrès, que je remercie pour son expertise et son grand professionnalisme. 
Tout cela contribue à l’interprétation finale proposer sur ce disque. Avec une seule hâte : rejouer les Suites en concert au plus vite, et totalement différemment !

Valérie Aimard